Évolutions du marché français des drogues illicites
Dans un contexte marqué par une augmentation significative des niveaux de production mondiale, les changements dans l’offre de drogues en France en 2023 se distinguent par une concurrence intense entre les trafiquants et un perfectionnement des pratiques de vente ainsi que de l’organisation des réseaux de trafic. Les trafiquants utilisent divers outils numériques, tant pour promouvoir leurs produits et interagir avec les clients, que pour gérer leurs réseaux en interne. On note également une spécialisation et une segmentation des rôles au sein des réseaux criminels.
Criminalité associée au trafic de drogues
La hausse des violences liées au trafic de drogues est due aux rivalités territoriales et à la concurrence entre groupes criminels. En 2023, les règlements de comptes ont progressé de 38 %, avec 85 décès contre 67 en 2022, et un total de 418 victimes (y compris collatérales), contre 303 l’année précédente. Parmi les 8 000 armes confisquées par la police en 2023, près de 300 étaient des armes de guerre, reflétant l’intensité de la violence associée au trafic de drogue.
Le cannabis demeure la drogue n°1
Produit dans 146 pays, le cannabis est, selon l’Organisation des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), la drogue illicite la plus produite à travers le monde. Il représente la part la plus importante de saisies aussi bien dans le monde (59 % sur la période de 2021-2022), qu’en France, qui compte cinq millions d’usagers dans l’année et où le niveau record de saisies a été atteint en 2022 avec 128,6 tonnes interceptées. La teneur moyenne en THC du cannabis présent sur le marché français augmente tandis que l’offre se diversifie, tant sur les points de vente physiques que sur les plateformes numériques, où l’on trouve désormais des variétés de cannabis très concentrées. Finalement, l’herbe de cannabis prend une place de plus en plus importante sur ce marché, dont témoigne la part de plus en plus importante d’herbe saisie dans le total des saisies du cannabis en France (30 % en 2023 contre 6 % en 2013).
Le marché de la cocaïne en plein essor
En France, le marché de la cocaïne est en passe de devenir le premier marché de drogues illicites en valeur avant le cannabis et connaît une croissance rapide : en 2023, 1,1 million de Français en ont pris au moins une fois dans l'année contre 600 000 en 2017. Cette expansion s’inscrit dans un contexte d’explosion de la production mondiale grâce aux gains de productivité et l’optimisation de trafic. La position géographique de la France, la rend particulièrement vulnérable à cette variation de production à plusieurs titres. Étant le deuxième domaine maritime mondial avec plus de 20 000 kilomètres de frontières maritimes avec 30 États, la France possède à la fois des ports d’entrée sur le continent européen, alors que ses départements d’outre-mer sont proches des grandes zones de production, et deuxièmement à cause des frontières terrestres de l’Hexagone qui font d’elle une zone de transit pour la cocaïne en provenance d’autres ports. En regard à cette disponibilité accrue, la teneur en principe actif de la cocaïne augmente, tandis que son prix stagne.
Le renforcement des mesures de sécurité portuaire en 2023 a permis de réduire le trafic et les volumes saisis au port du Havre. Cela a contribué à une baisse des saisies de cocaïne en France en 2023, qui s’élèvent à 23,2 tonnes, soit 16 % de moins qu’en 2022. Il existe des premiers éléments montrant une reprise à la hausse du nombre de saisies en 2024.
Baisse historique de la production d’opium
Le marché de l’héroïne en France se distingue par sa taille plus réduite et une zone géographique de production spécifique : en 2023, 0,3% d’adultes en ont consommé. Néanmoins, les évolutions du marché sont suivies de très près : l’Afghanistan, qui assurait 80 % de la production mondiale d’opium en 2022, a vu sa production chuter de 95 % en 2023. Il en résulte des inquiétudes quant aux modalités de restructuration de l’offre d’opioïdes (émergence de nouvelles zones de production d’opium, expansion de l’offre des opioïdes de synthèse, ...).
Saisies d’ecstasy/MDMA record
Le marché français de l’ecstasy/MDMA est approvisionné majoritairement par les Pays-Bas, première zone de production en Europe occidentale. De plus, la France joue un rôle de pays de transit pour les trafiquants, notamment vers le Royaume-Uni et l’Espagne, et plus récemment vers l’Afrique du Nord. Ainsi, sur plus de 4 millions de comprimés (ou équivalents en poudre) interceptés en France en 2023, seulement 30 % étaient destinés à la vente sur le territoire français, tandis que 70 % étaient en transit, principalement à destination de la Tunisie et du Royaume-Uni. Cela représente un record pour ces saisies, en hausse de 164 % par rapport à 2022.