Sabrina Cherki, coordinatrice nationale du Système d'identification national des toxiques et des substances (SINTES), et Clément Gérome, coordinateur national du dispositif Tendances récentes et nouvelles drogues (TREND), décryptent les hypothèses expliquant la diffusion, notamment dans les médias, de l'expression "nouvelle cocaïne" pour nommer la 3-MMC.
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Qu'est-ce que la 3-MMC ?
La 3-MMC ou 3-methylmethcathinone est une molécule synthétique dérivée des cathinones. Elle est stimulante et se présente principalement sous forme de poudre dont les propriétés sont similaires aux amphétamines. Elle fait partie du groupe des cathinones de synthèse, qui est une famille de NPS, pour "Nouveaux Produits de Synthèse".
Les effets recherchés sont généralement l’euphorie, la stimulation et la libido. Aujourd’hui la 3-MMC est classée comme stupéfiant en France et de par sa diffusion croissante en Europe, a été placée sous surveillance intensive par l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies dans le cadre de l’Early Warning System, son outil d’alerte et de surveillance des NPS.
Est-ce justifié d'appeler la 3-MMC la "nouvelle cocaïne" ?
On observe de plus en plus l’utilisation de l’appellation « nouvelle cocaïne » pour nommer la 3-MMC. Cette expression, employée principalement par les médias, contribue à populariser son image. Pourtant les 2 produits ne présentent pas les mêmes propriétés pharmacologiques, ne produisent pas les mêmes effets et ne concernent pas le même nombre de personnes. La cocaïne est un produit qui fait l’objet d’une diffusion constante depuis 15 ans.
En 2017, on dénombrait environ 600 000 usagers dans l’année, soit 1,6% de la population. Bien qu’on ne dispose pas de données de prévalence pour estimer le nombre de consommateurs de 3-MMC, on peut faire l’hypothèse qu’il est nettement inférieur. Depuis le début des années 2010, le dispositif TREND observe des consommations de 3-MMC dans des contextes très spécifiques. La substance est consommée par des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes dans des contextes qui mêlent sexualité de groupe et consommation de produits de synthèse, ce que l’on appelle communément le chemsex.
Depuis 2017 environ, on voit que la 3-MMC est de plus en plus fréquemment consommée en dehors de ces contextes dans des événements festifs moins spécifiques, par exemple des boites de nuit, des festivals, des concerts, en free party ou en soirées privées et par des publics plus larges qui fréquentent ces soirées, des hommes, des femmes, gays ou hétérosexuels qui vont consommer occasionnellement différents produits psychostimulants.
Ces consommateurs qui apprécient les effets de la 3-MMC les décrivent comme étant une combinaison entre ceux de la cocaïne, de la MDMA et des amphétamines. Et le coût de la 3-MMC est bien inférieur à celui de la cocaïne, entre 30 et 40€, contre 50-70€ pour le prix du gramme de cocaïne.
Quels sont les profils de toxicité de la cocaïne et de la 3-MMC ?
Effectivement la cocaïne et la 3-MMC ont toutes les deux des propriétés stimulantes mais la 3-MMC a un profil de toxicité un peu différent de par sa ressemblance avec les amphétamines. On observe des effets indésirables comme l’augmentation de la pression artérielle ou de la fréquence cardiaque mais aussi au niveau du cerveau avec des états psychotiques comme la paranoïa et les hallucinations, de l’anxiété ou des insomnies importantes.
Il y aussi des risques liés à la voie d’administration, si la 3-MMC est injectée ou sniffée, avec des risques infectieux ou la survenue de lésions. La 3-MMC présente de nombreuses interactions avec d’autres produits notamment avec les stimulants ou les antidépresseurs. Comme d’autres stimulants, telle que la MDMA, on peut s’attendre à un effet de descente désagréable occasionnant des états de fatigue intense et d’irritabilité.