Historique
Les dernières données du Baromètre Santé de santé publique France coexploité par l’OFDT, montrent que l’usage de cannabis, qui reste le produit stupéfiant le plus consommé en France en 2021, se stabilise voire décroit légèrement ces dernières années. En revanche, au fil des trente dernières années, l’augmentation cumulée de l’expérimentation et de l’usage actuel parmi la population a modifié la structure démographique de la population usagère de cannabis. Alors que les « habitués du cannabis » étaient d’abord décrits comme de jeunes hommes dans les années 1990 et 2000, deux phénomènes retiennent aujourd’hui l’attention : le vieillissement des usagers actuels (dans l’année) et une féminisation de la population des usagers (la part des femmes était résiduelle dans les années 1990).
Le projet Novurc vise à répondre aux questions soulevées par les résultats des enquêtes quantitatives et à combler un déficit des connaissances identifié. Si ces enquêtes documentent, depuis 20 ans, l’évolution des usages et des modes de consommation de cannabis en France, elles ne disposent pas d’une puissance statistique suffisante pour caractériser précisément les profils et les pratiques des usagers quotidiens ou quasi-quotidiens de cannabis.
Partenariats
L’étude est réalisée par l’OFDT, qui en assure la coordination. Le projet est financé par le fonds de lutte contre les conduites addictives de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), au titre de l’édition 2022 et pour une durée de trente mois.
Objectifs
Il s’agit globalement de décrire et de comprendre les pratiques, les trajectoires de consommation et les modes de vie des usagers et usagères de cannabis de plus de 30 ans qui consomment quotidiennement (ou régulièrement) du cannabis depuis plusieurs années. L’enquête cherche à comprendre comment l’usage de cannabis est arrimé à des modes de vie et quels sont les facteurs qui jouent, en pratique, dans ces types d’usage, comme des conditions facilitant l’accès au produit et l’installation dans des habitudes de consommation. L’un des enjeux de l’enquête est de rendre compte de la façon dont l’usage de cannabis s’inscrit dans la vie quotidienne et dans un mode de vie propre aux nouvelles générations d’adultes. Une attention particulière sera donnée aux trajectoires de consommation : comment la fréquence et les motivations d’usage varient dans le temps, et quels événements rythment ces changements ? Comment l’usage de cannabis évolue-t-il avec l’entrée dans la vie professionnelle, la mise en couple, l’arrivée du premier enfant etc. ? Comment s’articule-t-il à la vie professionnelle et à la vie sociale en général ? Comment est-il habituellement « géré », contrôlé, surveillé voire auto-régulé ? L’intérêt sera également porté sur les démarches de gestion et de contrôle de la consommation et aux éventuelles expériences de réduction ou de sortie de la consommation.
Dans une perspective compréhensive, il s’agira également de saisir les motivations d’usage, de les mettre en rapport avec les quantités consommées, les modes d’approvisionnement (achat illégal en direct, par SMS, réseau social ou en ligne, avec ou sans recours à la livraison, don, partage, auto-culture etc.), les modalités de consommation (fumé, ingéré, vapoté, etc.), les habitudes et les préférences de consommation. Il s’agira aussi de rendre compte des pratiques de polyusage : comment la consommation de cannabis entre-t-elle en interaction avec d’autres consommations de substances psychoactives, en premier lieu l’alcool, les substances médicamenteuses mais également les autres drogues illicites ? De façon plus transversale, l’enquête ambitionne de repérer des profils d’usagers et de dessiner une typologie des consommateurs et des carrières de consommation.
Méthodologie
Le projet d’enquête sera structuré par la conduite d’entretiens approfondis (et parfois répétés, n=80) auprès d’une soixantaine de consommateurs et consommatrices d’âges et de milieux sociaux variés dont l’usage de cannabis est quotidien ou régulier.
Le recrutement des enquêtés répondra à un objectif de diversification des profils. Il pourra s’appuyer en partie sur le réseau du dispositif Tendances récentes et nouvelles drogues (TREND) de l’OFDT, les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), le bouche-à-oreille (par effet boule de neige) et, potentiellement, via les répondants et répondantes de la web survey 2021 de l’OFDT (sous réserve de respect de certaines conditions du RGPD).
Une partie des personnes enquêtées (15 à 20) pourront également être sollicitées pour un second entretien. Il serait alors opportun d’élaborer la constitution et le commentaire (au cours du second entretien) d’un carnet de consommation (technique classique en économie et sociologie de la consommation, utilisée également pour l’étude du travail domestique) relevant de manière détaillée les quantités, formes, moments, lieux et moyens d’achats des produits consommés. Ce corpus resserré permettrait de constituer des études de cas précis et de confronter discours et pratiques des personnes enquêtées.